Cituation du mois de novembre 2020 (Cituation #51) :

« Reconnaître la présence d’un proverbe dans une situation donnée peut fournir une perspective toute nouvelle sur cette situation. C’est porter un regard abstrait, non évident, qui, dépasse la similitude superficielle. Les proverbes sont utilisés pour désigner des catégories abstraites et complexes, dont la subtilité est telle que leur incarnation par une situation concrète permet de donner sens à une situation qui sans cela serait quelque peu obscure. La décrire par le proverbe la rend intelligible. L’application d’un proverbe à une situation jamais vue auparavant fournit une compréhension qui ne provient pas d’un enchaînement logique abstrait mais qui résulte de l’adoption d’une certaine perspective sur cette situation, une sorte de filtre construit sur la base du cas concret décrit par le proverbe. Un proverbe sert donc d’étiquette pour une catégorie, éventuellement vaste, de situations passées, présentes, futures, hypothétiques, etc. – très variées entre elles mais qui sont néanmoins liées les unes aux autres par analogie. »

Douglas Hofstadter, Emmanuel Sander, L’analogie, coeur de la pensée, p. 128, Odile Jacob, Paris, 2013.

Les proverbes, tout comme les fables, les expressions ou les simples mots, sont des étiquettes sur des catégories de situations qui nous servent dans la vie de tous les jours pour comprendre le monde et pour communiquer :

« (… /…) ce n’est pas la valeur de vérité d’un proverbe qui compte, mais sa faculté à faire percevoir une situation, à l’interpréter au-delà de l’observation de l’enchaînement des faits. »

Douglas Hofstadter, Emmanuel Sander, L’analogie, coeur de la pensée, p. 129, Odile Jacob, Paris, 2013.

L’utilisation d’un proverbe illustre la présence d’un « squelette conceptuel » entre des situations qui pouvaient sembler différentes en premier abord.

« À quel degré de généralité un proverbe s’applique-t-il ? Quelle est l’étendue des situations auxquelles un proverbe peut être attribué sans que cela semble exagéré, voire incongru ? (…/…) l’ampleur de la catégorie couverte par un proverbe indique une capacité de rapprochement entre situations qui ne partagent une essence commune qu’à un niveau élevé d’abstraction, et en dépit de nombreuses différences à des niveaux plus concrets. »

Douglas Hofstadter, Emmanuel Sander, L’analogie, coeur de la pensée, p. 134, Odile Jacob, Paris, 2013.

Le proverbe permet de rendre concret cette catégorie abstraite, cette essence commune, ce squelette conceptuel (la cituation du mois précédent parlait de noyau de situation).

« (…/…) les membres de la catégorie abstraite dont le proverbe est l’étiquette lexicale semblent aussi réels, voire presque aussi visibles et tangibles, que les objets matériels. Tout autant qu’il y a des ceintures de sécurité et des enfants à l’arrière de la voiture, il y a une situation mieux vaut prévenir que guérir dans la voiture. Tout autant qu’il y a un fouillis indescriptible dans la maison et une fête d’adolescents dans le salon, il y a, dans la maison une situation quand le chat est parti, les souris dansent. Tout autant qu’il y a une proposition d’embauche en suspens et la peur de ne jamais trouver une offre à la hauteur de ses attentes, il y a dans l’air une situation un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. II est clair que les catégories vont bien au-delà de ce qui est étiqueté par un simple mot.»

Douglas Hofstadter, Emmanuel Sander, L’analogie, coeur de la pensée, p. 139, Odile Jacob, Paris, 2013.

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